vendredi 29 mars 2013

Musique




Quel tempérament ce sacré qui ondule dans nos cœurs. Coupé de toute ergonomie, le corps peut encore se mettre à souffrir et aimer dans une allocution verbale et celle plus forte, de la musique, de celles dont on dit qu'elles sont de la grande musique. 

Véritable passation des pouvoirs entre celui qui est de l'ordre des lois sociales, et celui dont on ne retire comme pouvoir que sa lecture plus proche de la peau, de l'affleurement de la peau, vers cette intériorité du corps d'où les sens partent, en images drapées du risque d'infinies représentations qui se répètent inlassablement pour trouver ce plaisir qui inocule à la chair sa très sainte satiété. Musique au long discours enflammé par les sons qui frôlent et rencontrent le cœur plein du désir inassouvi de jouir dans l'infiniment grande acception du corps amoureux. Écoute extraordinaire de ces accords évanescents et suspendus à trop de béatitude. Le vent et les sons vont et viennent en irruptions atomisées dans ce corps de la dépense; là encore le regard semble pris en défaut. Jeux écartés du temps présent qui s'essouffle de trop rencontrer l'espace du corps qui pense. Pense pour avoir écrit ces exhortations pour en jouer, en prendre acte, les exposer au temps de l'air, de l'air qui souffle jusqu'au futur qui se trouve pris dans l'écriture musicale comme composition de la dépense qu'un corps qui pense peut d'écouter sa chair, avant que l'écriture ne revienne dissoudre l'air entendu, comme disparition inévitable de ce présent dans un ordonnancement de la mémoire; là la mémoire rétroactivement se risque à d'autres images pour inventer l'écriture musicale de son futur présent. Du sacré, voilà qui sort fort bien de ce présent pour que ce corps croit encore à sa pensée en passant par les ondes qui transportent les sons insufflés par l'étant de l'être là comme disposant de sa chair pour dominer sa dernière parole, la dépasser, la transfigurer, et rencontrer l'apothéose dans l'écoute magistrale d'une composition instrumentale encore trop sourde pour être entendu, sous les coups de ces artifices dont on sait qu'ils servent d'instruments, de relais pour déposséder l'être de sa complétude, de sa fracture avec la parole identitaire d'un sujet pensant. On traite de dérive la musique qui semble s'étirer sur des refrains, ou sur une répétition des accords, pour user de la transe, comme bombardement de l'intérieur du corps; jusqu'à le priver de cette pensée qui viendrait se fixer dans une horreur de sa dramatisation du corps qui ne jouirait qu'à ne jamais penser? Qui ne jouirait qu'à ne plus penser la douloureuse fin de son temps lentement revisité par la mort, le vide, la perte de mémoire programmée par le corps qui se délite. 

La résurrection que la musique propose, est l'enveloppement des sons dans les plis de la peau. Caresse sur un temps inassouvi, enfoncement de l'air entendu dans l'extrême intériorité de la chair, vers cet être insoupçonné, jusqu'à l'âme transfigurée par l'allégorie envoûtante, telle une drogue, d'une musique qui s'allonge aussi loin qu'un corps a de se délivrer à découvrir ses plaisirs cachés. Voila donc l'extériorité de la musique. Tête à tête avec l'autre composition de ce continent sauvage.


La sortie de ce fléau qui rogne l'esprit du très oublié corps, c'est encore rencontrer la musique comme si celle-ci, en sons économiques, venait à recomposer le corps qui musique avant la lettre, juste déroulement de la peinture qui commence, hypertrophiée par une jouissance qui n'en finit plus d'accomplir sa très fragile reproduction des sons, dans une récidive inquisition du corps enlevé de son élévation colorée.




Thierry Texedre, le 29 mars 2013.

samedi 23 mars 2013

Du juste temps



Sous quelle disposition le temps se soude? Vers sa terreur de la vie, versatile irruption de la nature qui dresse sa peau, comme commencement de la représentation. 
Sous quels hospices la vie tient, devenue maîtresse de la chair, pour construire cette terrifiante culture, celle qui confirme l'intelligence de l'animalité faite pensée? De biais, le corps se met à reprendre et à reconnaître l'altération de la vie sous différentes formes et différents états pulsionnels du corps pensant. Ce corps dissout dans l'immensité de la matière, semble coloré, plutôt mis en couleur, pour expulser cet aveuglant registre de la mort, partout présente dans la chair. On tient là l'apothéose d'une vérité qui se mettrait à renaître, juste pour éviter de ne pas faire volume, du volume de ce corps dessiné dans la sculpturale hérédité de l'art. Voir, voilà que se pose la question qui suinte fort la nécrose, immanente forclusion du terrible coup de butoir sur l'intellection de la foi, que cette foi soit la voie surannée qui s'impose à la vision, d'un corps pris dans la parole; de la parole, prisme de l'envie d'explorer les orifices du temps de la peur d'y voir? Fragile sinuosité de la peau qui s'émancipera plus avant, de sa surface, pour produire, avec la répétition, ce fracassant pouvoir de reconnaissance du temps. Le temps serait cette irruption de la raison dans l'impossible arrêt de la vie, comme lieu de la conscience, lien avec la pensée en action; l'action painting peut-être du moment révélé de cet inconscient mis à découvert? Le temps se souderait donc sous l'effet de l'action painting? 
Dans quelle peinture ce temps provoquerait-il assez de réalité pour faire croire à l'autre, ce nouveau qui vient se mettre de travers dans le temps représenté comme action? Voilà le pire scénario qui se jouxte à celui de l'inversion du temps comme corps d'écriture ou corps de l'animalité. On tremble à l'idée de croire ces chefs-d’œuvre comme le déroulement de l'irrésolution de la pensée qui sert l'incompréhension du désir devant l'être; sujet du questionnement? Folle extinction de la chair qui semble s'arrêter là où le corps concave s'ouvre. 
Corps concave? Corps de l'intériorité des sens, exploration de l'illusion de ces corps comme chair de la béatitude, chair de la jouissance, chair de la douleur, comme chair de ce corps diurne aussi. La nuit du corps serait alors la mise sous tension de sa désespérance; celui-ci viendrait à se retirer de la voix, de la parole, pour alors seulement produire ce corps de chair anonyme, traumatique, tronqué et hystérique.
Faut-il que ce temps de la forclusion se soude? Est-il irresponsable d'aller chercher un autre temps qui "colle à la peau" de ce réactionnaire temps présent ? Le réel de ce temps n'est-il que le reflet mal extirpé d'un autre temps plus transversal, de ce vivant héritage du temps socialisé qui interfère sur notre état de pensée? Je crois que cette foi doit s'empresser de reconnaître quelque matière picturale qui a à voir avec cette autre foi dont l'histoire dira qu'elle est pour partie cette nouvelle sortie du coin dans la plaie béante du corps de l'humanité en mal de foi.

Thierry Texedre, le 23 mars 2013.


"Aujourd'hui, au XXIe siècle, le néant guette la peinture. Le rasoir d'Ocham a trop bien fait son travail, par élimination, destruction, réduction, décomposition. Fin de la peinture, mort de l'art ? C'est le moment de la vidéo, de la photo, du film, de l'installation. Mais tout cela peut être aussi l'art. Je crois que Bill Viola est un grand artiste. Seulement il s'agit toujours de l'image reproduite mécaniquement."... "Or la peinture possède un plan, une dimension qui est proprement la sienne et irremplaçable. La peinture est une sécrétion humain, travaillant directement dans la chair de la matière. Il y a une présence physique immédiatement, viscéralement vécue. Dans la peinture, c'est la chair qui devient verbe.
Et cette sécrétion chimique, alchimique, continuera avec de hautes et basses périodes, mais sera toujours présente tant que l'homme vivra encore sur cette terre ou même peut être ailleurs sur une autre planète, quelque part dans le transfini des univers." Judit Reigl



l'atelier de Judith Reigl



jeudi 21 mars 2013

Les plis du temps










 
Travers du coup
sur la peau qui
lit l’œil frappé
par on ne sait quelle
poisseuse vérité
sur la béance du
col poli pour
s'asseoir dessus
vertueux et
éthéré c'est l'envie
le trou béant de
l'exactitude du
temps taraudé par
la parole
du désir
malhonnête
qui va boucher les
orifices justes
c'est pour rire je crois
juste pour écrire ces
quelques notations
improvisées dans
la couleur du temps
un grand coup
de derrière la
dérive du corps
qui s'affale de tout
son long ligature
des trompes l’œil
ne peut plus pleurer
il est rond et le
corps se convulse
déjà pour se lier
avec la mort
à trop y voir
la lumière et
les sons sur la
plus énigmatique
musique jouée pour
les funérailles de
l'amant dénié devant
la parole de ce dieu
unique parole qui
couvre tous les ans
amoncelés dans
cette souveraine
souffrance du jouir
qui jalonne les
rives du corps
secoué dans sa
chute sans cesser
de naître il file
dans l'espace de
l'esprit arythmique
de sa queue collée
au fil des ans
sur une peau
intérimaire triangle
des annonciations
de ces chuchotements
anonymes et féminins
en filigrane apostrophé
se range du côté des
amphétamines
pour convaincre
le sort du monde
d'aller dans ce
sacré en coin
certainement
en train de se
faire dévorer
par le temps
tantrique.




Thierry Texedre, le 21 mars 2013. 


 

mercredi 20 mars 2013

Sinuosité de la peau niée




Secoué par le temps du court recourt à l'asphyxie instantanément tournée vers l'avenir de la polémique entre la vie et la mort, ce renégat de corps va choisir ou choir. On le traîne dans les plus pitoyables aspérités de la peau pour jouir, jusqu'à rompre avec la paupérisation de la pornographie, juste fin de l'hétérogénéité dans l'irréalité de la parole qui se répète inlassablement, traversant les rivages irradiés de l'amour qui s'évade dans l'espace de l'hystérie. Déplacement du corps qui est un corps prématuré, rouage de la parole refermée dans la répétition inaugurale de l'écart jouissif du corps avec sa dramaturgie. La fin tragique de l'homme dans sa dérive sans nom du corps voué à l'obscur tournoiement de cette vérité qui s'efface au profit de la réalité, va le conduire à recommencer sans cesse, avec l'écart qui le destine à la reproduction, une rare empathie pour l'analytique résolution de son être tourné en dérision par le corps hypertrophié de l'exaltation pour sa peau ouverte en dramatiques sens expulsés par « l'avent » de la naissance du lieu de « l'endroit » résurrectionnel. Fétichisation de la naissance pour expulser de ce corps ce qui le met en situation de jouir, jusqu'au lent passage vers un volume lumineux de son intégralité. Utopie ou vérité qui ira jusqu'au déchirement probable de la peau. Contorsions qui semblent ne cesser que pour laisser la place à ces replis du souffle en catatonie, voix qui supplie et danse avec les onomatopées, faisant volte-face avec sa laideur, son grain de peau taraudant cet être jusqu'à son inconsistance, son insuffisance. Tout semble se rétrécir jusqu'à la peinture qui remplace ces mots avalés, altérés, par l'énumération de ces sens, en lieu et place d'une peau tirée à quatre épingles. Avançant dans une matière colorée qui frappe la peau - jusqu'à relever la couleur, chaude censure du corps coupé, plages outrées, ouverture de la chair jusqu'à cette innocente inquisition du dedans par l'esprit qui traverse le corps de la jouissance pour exister – l'étant se justifie par son irremplaçable visitation du corps-matière inopinément revenu, de l'être diminué jusqu'à son plus petit grain visible (le grain de la conscience insupportable à écouter). Le corps tombe donc à n'être plus que le gramme inconscient de la vie qui s'étire comme peau du néant nébuleux. Ce qui revient à dire que la peau n'existe que comme interdit du temps nié.



Thierry Texedre, le 20 mars 2013.

samedi 2 mars 2013

Caresse sur cet infini inviolé

 



La formidable générosité du corps, par ses glissements crescendos, la peau qui enfle vertueuse, rassasiée de ne jamais s'en tirer que par d'infimes tressautements imperceptibles, de l'érectile suavité de la surface du corps enivrant, par ses cantiques caressant nos oreilles impunies... Quelle somme qui traverse les pores aériens de ces incommensurables trésors chantés pour l'éternité, trop vite éloignés... On voudrait s'y perdre, s'y reposer, s'en remettre, que Dieu me pardonne ces affabulations, mais ce corps qui soi-disant se délite, restera à tout jamais ma terrible mémoire qui n'ose plus s'effacer de mon être délivré par tant d'agonies intérieures... L'affect, ces pulsions invincibles, vont et viennent tels des oiseaux en proie à d'effroyables surgissements, dans ce sommeil qui cesse par cette apocalypse rayonnante qui souffle sur tant d'amoureuses rêveries dont on ne voudra jamais cesser d'y être plongé... Quelle souffrance vénérable peut tenir devant le temps de cette peau qui dévisse tout notre être, défiant la pesanteur sous l'habit de fortune... Les plis du regard vont et viennent dans un va-et-vient proche de l'objet sur l'eau, navigant à vue - la face irradie sous les traits grimaçants de l'apothéose survivance de la peau. J'avale ces maux immatures pour exciter mes sens, sans discontinuer, en rires effarants, en partageant ce bonheur; ourlet à ma vie qui s'arrête l'instant d'un trop grand émoi, penché sur mes amours éternels... Mes mains caressent la peau jusqu'à l'infini, immensément grande la sensation qui monte en moi, vertigineuse exclusion du monde des vivants, vers l'irremplaçable jouissance de ces attouchements dissidents; que la chair rencontrée restera inconsolable... Maquillage involontaire du temps qui pousse la surface à rencontrer un volume, relique le jour où la mémoire cessera d'extraire ce volume devenu plus vrai que nature. Vieille lune aux rides carnassières, la fin de vie entre partout où la peau encore tenue et tendue joue de ses ondes prometteuses... L'heure est à remonter le courant jusqu'à quelle source? La peau est douée d'une extrême élasticité, peut-être jusqu'à cette naissance qui vous lie avec l'erreur de naître. L'étalement entre en scène, les mains affleurent la peau légère et lisse. Sa couleur m'importe peu, la peinture est là pour faire le reste. C'est-à dire tout ce qui n'a pas à faire et qui n'a rien à voir avec ces caresses ontologiques, puisque tout mon être s'y induit... L'infini dénaturé de l'être est cet élégante béatitude qui nous sied devant l'éternité inviolée du néant...



Thierry Texedre, le 3 mars 2013