mardi 15 mai 2007

Bien avant qu'un corps ne s'y passe...




Sans titre, No29, 1974, Louis Cane, 305 x 586 cm.




- Faut-il que nous dressions un portrait plus théorique de la
peinture qui s'ouvrirait vers un futur où celle-ci donnerait
le La à tout dire; comment envisagez-vous de poser ce
programme qui rendrait à la peinture une place
aujourd'hui qu'elle n'a plus, ou qui l'a fait se soustraire
au jeu politique et social que nous avons mis en place?


- Oui bien sûr, il est temps pour les artistes de s'ouvrir à
la peinture qui entre dans une nouvelle ère, à l'écoute,
donc au discours, et par là à la parole commune. En cela,
je crois que l'image sera ponctuée dans des oeuvres où
figure et "all over" viendront créer une secousse sismique
au niveau du verbal, de tout parlant devant la toile, comme
bien sûr réserve, réceptacle du travail formel qui consistera
en un autre point de vue que celui esthétique (qui à vrai
dire ne l'était pas pour l'époque), du point de vue du beau,
de la représentation qu'en ont transposé les Grecs. Comme
l'a démontré un Barnett Newman dans ses écrits, et plus
récemment de Louis Cane et de l'apport théorique de
Marcelin Pleynet également. Il faudra en passer par le
grand peintre Ad Reinhardt qui a posé les fondements d'une
pureté, d'un état de grâce chez le peintre mais avec en
amont un travail sur l'objet peint qui n'est Art qu'à vider,
qu'à creuser la figure, jusqu'à la confondre avec la vie.
Un tel enseignement reste appuyé sur celui d'un Marc
Devade qui revisite la subjectivité Chrétienne. Et encore
l'Infini qu'un Marc Rothko irradie, c'en est plein de penser.
Conscience autre que celle de la renaissance où je ne parle
pas de la perspective mais de la profondeur qui au XXe
siècle s'est renversée dans l'abstraction; par un travail sur
la surface où disparaît la question de la figure, au profit
d'une lecture narrative. C'est dans cet espace d'ouverture,
que peuvent intervenir des peintres au plus près de
fondements proches d'un espace où du corps doit advenir,
en tant que posture signifiante dans le tableau, celle du
sujet parlant. L'image n'aura de cesse d'être brisée, mais
le format demeure la seule vraisemblance tournant
autour de l'oeil du sujet. De celui qui vient trouver son
espace, osmose avec ce qui va faire qu'il aura la parole
sortie de cette image. Tout ceci n'est pas une histoire de
nature, ou de vérité, c'est une autre science qui vise à
construire un sujet dont les attributs vont visiter le
mouvement "télévisuel"généralisé. La techné n'aura de
cesse d'évoluer selon l'image générée, selon ce qui sera
déplié d'un futur producteur de social, producteur d'oralité.
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Thierry Texedre, mai 2007.