lundi 11 décembre 2023

L’espace reconsidéré chez Jorinde Voigt

 

 
 
 
 
 
 


 
 
 
 
 
 
 
  
 
 
 
 
 L’espace reconsidéré chez Jorinde Voigt


Si on retrouve des accointances entres certains artistes, certaines liaisons sont plutôt le résultat de parcours très différents. Une ressemblance ou bien un recoupement temporel dû au fait générationnel plus qu’à un regard saturé d’approches picturales préoccupées d’idéologies encartées dans une régression figurative ou expressionniste. Ici, penser montre un tout autre chemin pictural. « L’artiste cherche à développer des méthodes appropriées pour comprendre la constitution interne des images archétypales, ce qui se cache derrière ce que nous voyons, et comment ces images peuvent être vécues collectivement ou partagées. » La grande différence avec une peinture conceptuelle, réside dans l’approche collective du traitement pictural ici encore une fois mise en évidence par une cartographie comme réceptacle primaire d’une mise en avant d’une peinture contre ce qui le met en scène et le rend individuel. Jorinde Voigt est née en 1977, plus jeune de 7 ans que Julie Mehretu et 6 ans que Jessica Rankin, et par là même on remarque des rapprochements malgré l’éloignement géographique de Voigt qui est allemande. On retrouve aussi une recherche parallèle sur la mémoire chez Naomi Middelmann. artiste suisse. Si leur travail est différent, des réalisations des méthodes largement opposées, pourtant, les trois artiste semblent montrer une quête qui a pour effet l’apprivoisement d’un système mondialisé et déterminant une perception qui procède d’un même territoire. Une immersion, une quête, une graphie du temps, de la perception, de la mémoire et de la connaissance. Il y a comme une vision du dessus, combien même la peinture se voit de face. Ce qu’on ne peut voir ni penser pour la représentation, montrer une figure compréhensible par ses liens avec l’objet dans une symbolisation qui fait passer l’esprit, le signifie, par l’usage d’une lecture, une reconnaissance verbale, la langue. Là, l’artiste dessine dans l’espace des concepts, des flux de données impossible à déterminer sans l’usage de perceptions autres, satellitaires, informatiques, de l’intelligence artificielle, de captures macroscopiques et microscopiques, etc. Tous ces territoires frôlent une certaine saturation. Souvent Jorinde Voigt nous fait voir cette réalité surdimensionnée où l’individuation est montrée comme un dessin une microscopie en plongée, une immersion électrique [Son intérêt pour la musique l’a amenée à montrer des expériences musicales sous formes de vagues, d’ondulations résonnantes. Une forme revient, récurrente, le tore, « comme une équivalence qui existe dans le dialogue continu . Le Torus reconnaît à la fois notre perception de nous-même et parallèlement, la manière dont nous sommes perçus »] peut-être dans le risque d’attenter à toute perspective, même celle du corps de la dépense, on croit encore qu’il y a une possible réévaluation, faut-il repenser l’espace, n’y en va-t-il pas autrement, aujourd’hui, de cette mise en tension de l’espace à reconsidérer ? Et la couleur là dedans me direz-vous ? Il ne tient qu’à vous d’aller résoudre cette énigme en parcourant les graphies de toutes ces transparences. Le temps n’est-il plus coloré quand on se risque à montrer le monde en surplomb ?




Thierry Texedre, le 9 décembre 2023.


Jorinde Voigt (1977-)

artiste peintre et dessinatrice allemande

née à Francfort sur-le- Main, Allemagne

vit et travaille à Berlin

 
 
 
 
 
 
 
 
 



jeudi 23 novembre 2023

Marc Rothko, plage

 

 
 
 
Plage
Au loin le long train-train du travers l'espèce de certitude qui nous ronge de l'intérieur voilà ce qui nous plonge dans l'indifférence de ce corps usurpateur sali par l'insupportable excrétion du ventre maudit de loin en loin ça s'use si on regarde hors du corps-cavité hors de sa gangue de gueule insalubre et lubrique puant l'a-pesanteur du sexe moribond insatiable enfournant de son foudre la tête dans l'anus pubien du crâne volubile du crâne incendiaire qui croît à mesure que ce liquide séminal remplit la gorge trop profonde à sec la discrétion semble de mise ici tout près plutôt au plus près d'un visage aux yeux troubles puisque l'autre n'y voit que du feu il retourne à l'envers sa touffe-cheveux forte pilosité derrière devant discutant à ne plus savoir rien de ce qu'il chante en entonnant sur un corps étrange un corps sans nom ni tuméfaction lisse un corps ivre qui vocifère la langue impossible avalant la chair totale qui va s'interposer la voilà à une parole ignifugée celle de la chair de l'âme de l'autre sur cette plage de sable fin et doré trop chaud pour s'y allonger. La peinture nous inocule, indifférente à la vie, cette soumission au risque, face au néant, au chaos des choses. Il y a comme un malaise devant la peinture qui nous emprunte, vole nos illusions pour nous illuminer alors. Tranche de vie depuis une plongée dans l'essentielle monstruosité du dedans entrain de remplacer ce qui dehors est hors de notre portée. Ouvrir et refermer l'opercule informe du temps, c'est faire une pause, se poser là où tout devient possible d'un désir avoué, depuis l'astre mortifère, par delà les usurpations de sens. Ça tremble lentement devant ces espaces infinis aux tréfonds de couleurs ancestrales on croit remonter aux sources de cet inconscient inhospitalier c’est la « carnaissance » « l’incandescence » révélée revisitée en intriquant l’histoire d’une peinture et celle d’une plongée improvisée et inquisitoire c’est là qu’une suspicion s’installe se met en mouvement comme pour nous démontrer que la peinture n’a rien à voir avec ce qui s’y voit depuis l’interminable vélocité du regard en attente de plaisir pour cacher sa mise en abîme de la pensée depuis ce déplacement temporel cette réalité qui nous met en émoi tant pis pour ce qui se trame du réel peint par l’artiste ici Marc Rothko.
 
Thierry Texedre, le 23 novembre 2023
 
 
 
Mark Rothko, 1961
Orange, rouge, jaune
 
 
 
 
 

jeudi 9 novembre 2023

Polylogue 1, 2

 


 

 

Polylogue

1


Sur quelle aisance

ce dire sonne

pourquoi tout dialogue

sort de la langue

position d’une pause

rupture d’un sens

sur une mémoire

longue litanie du vivant

entrain de se couper

monde du vraisemblable

tout sujet de l’élocution

n’a de cesse d’attenter

au risque enivrant

de taire une norme

l’établissement d’une loi

la vie rencontre ce sacré

s’interdisant de reconnaître

la loi comme illumination

le corps touche sa fin

quand il prend en charge

la parole comme acte

le dedans est ce pour quoi

le rêve existe constant

contre le temps de la loi

le transfert s’opère

quand une écoute

intérieure semble

toucher au corps

à sa cavité sa chair

le plaisir qu’un corps

a de commenter de dire

ce corps plonge

l’esprit dans un sens

que le temps nomme

contre toute extériorité

d’un réel attaché au vrai

l’enfermement est cet état

du réel qui oblitère le vrai

sous l’impulsion

d’une rencontre

celle de la voix

qui fait crier le corps

soumis à l’image

au même à l’unique

comme objet désiré

objet de l’insoumission

sorte de croyance

encéphalique mimesis

qui sort le pensant

de sa toupie c’est l’horreur

d’une exposition

un discours produit

c’est une supplication

qui s’avance se lit

l’interdit du corps

sa gangrène

cette sorte d’avant

qui tourne la tête

jusqu’au vice versé

en sang polémique

révolution de travers

l’instant diluvien

du commun touche

au massacre et à la terreur

les corps sont voués

à la découpe pure perte

de la désobéissance à la loi

la monstruosité règne.


2


En plongée l’art s’étire

vers ce sacerdoce

cette impuissance à finir

c’est l’or du bien

qui pour sévir saute

sur les desseins créés

dans l’air ignifugé

l’ourlet du corps nu

ôté de ses sens

pour laisser vibrer la chair

au purgatoire du désir

la puissante exaltation

de ces pleurs inavoués

vous emmène divine

fracturant le vol

interdit de l’esprit

dans ce ciel ostentatoire

l’espoir osmose

balançant la vue

de travers pour

exaspérer la peinture

elle est la promise

l’immersion du sacré

dans un corps dénaturé

sexe applaudit

par l’étreinte maudite

par quel risque coloré

partout sur la toile

glissent les gouttes

de ces cœurs affadis

d’où aucune raison

ne sort vaincue de douleur

ça cogne le plaisir

l’immoralité de l’âge

les plis surnaturels

qui vous promettent

l’allongement servile

du temps détrempé

par la couleur érudite

le violon de celle qui bat

que se souvienne

cette musique encore

pour qu’un jeu se joue

de la fin ou de la mort

le sarcophage bleu

se referme sur la foi

bénissant la sale vie

la vie qui s’ouvre

soufflée des seins

en coupe de face

de profil les doigts

pliés à plat de travers

le peint dévisagé

par l’œil en coin

en bas vu du haut le sexe

l’intégration mise en pause

le jeu en vaut l’envie

d’abstraire de soumettre

d’absoudre l’infini

pour résoudre un défi

celui d’une absence

l’absence de ces voix.



Thierry Texedre, le 11 novembre 2023.





Pablo Picasso

« La suppliante » 1937

gouache sur bois, 24 x 18,5 cm













 

lundi 6 novembre 2023

siffle le silence

 


 

 

Siffle le silence


L’hypnose fouette

l’horreur l’oiseau ardent

se couvre d’un silence

dans l’ombre du dernier saut

se cache là derrière la foi

les larmes sans fin

tombent d’une épreuve

pour partir du ventre

averti de la douleur

d’une course éperdue songe

le regard de l’autre tremble

fou et vulnérable s’agitant

chante en sauts interrompus

pour la première fois

pleure dévoré

et l’oiseau tombe sans cri

du désir ses ailes mouillées

pourquoi des notes odorantes

au loin frappent un printemps.



Thierry Texedre, le novembre 2023



artiste peintre Caroline Dahyot

 

 

 

 

 

 

samedi 4 novembre 2023

La peinture Rock de Lucie Picandet

 

 
 
 

 

 
 
 
 
 

 
 
 
 
 

 
 
 
 
 

 
 
 

La peinture Rock de Lucie Picandet


Aurait-elle été exécutée un temps passé d’un point de vue « surréaliste », à extraire du monde mis en peinture ces objets de leur inclusion au réel, et ces objets seraient-ils alors confrontés à un autre réel, celui de la peinture reconstruite selon une « écriture automatique », une dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle « exercé par la raison » ? Le pouvoir de la peinture aujourd’hui le permet toujours, même si l’éveil lui, n’a plus grand intérêt à se soumettre à de tels approches. Pourtant, à y regarder de plus près, on traverse bien cet intérêt pour l’histoire du surréalisme. Le dadaïsme est littéralement le point de départ de l’œuvre de Lucie Picandet. Pourtant, le fil conducteur de cette peinture sera celui du Rock. Toujours prête à délivrer un message, sous de nombreuses controverses visuelles. Ses associations nous confondent, pour que nous recomposions un univers hybride, comme pour palier au manque de jonctions entre les objets peints, pour nous essayer à une lecture littérale. Au début, les peintures montrent des textes en incrustation, comme pour faire la jonction entre l’écrit et la vision, une vision qui ne serait plus seulement récréative, mais faisant une incision, une coupure dans le réel, libérant l’inconscient de sa gangue esthétisant ; le sujet se délivrant d’un impossible lien avec ce lieu, celui du temps de la déconstruction. Puis, l’artiste produit de nouvelles consonances, l’abstraction touche la figuration pour battre cette résistance électrique de l’une sur l’autre ; la paranoïa et l’hallucination déforment toujours le spectre peint. Ici, l’artiste montre que le hasard produit la même chose que le rêve. « Les fragments individuels sont insignifiants pris hors de leur contexte, mais vécus collectivement, ils possèdent une signification plus grande ». Les gens peuvent alors entrer dans un univers « d’incarnation ». On rencontre la vie qui pousse, on y « croit », vu que ça croît, dans les dernières peintures de Lucie Picandet ; les textes disparaissent au profit d’un encrage verbal externe, là où le regard va permettre de penser un autre réel, un volume, celui du sujet. « La peinture nous montre que penser c’est autre chose, pousser, croître en peinture, au plus proche de la nature, là où chaque goutte d’eau contient un infini. » « Les formes symbolisent une action précise sur la conscience. »


Thierry Texedre, le 3 novembre 2023.



Lucie Picandet (1982-)

artiste peintre née à Paris

vit et travaille à Fontainebleau, France



 

 
 

 

vendredi 20 octobre 2023

Pour un temps de la possession

 




 Pour un temps de la possession


Ici passe le sacré un temps absolu

telle règle inorganique pèle mêle

sur les motets de l’insubordination

là sonne l’ici bas l’entre deux divin

que la garde sonne l’absence enfin

tourné par les plaies d’un discours

usurpateur et concupiscent et étréci

sur le corps pleureur l’esprit refoulé

un automne assermenté quel vertige

on croirait le retour à l’animal bévue

jour d’une épuisante marche putain

le voile se referme sur l’exhortation

l’enflammée déesse le cœur en croix.



Thierry Texedre, le 20 octobre 2023.


Francisco de Goya

Saturne dévorant un de ses fils (1747-1823)









Kirstine Reiner et l’insensé

 























 Kirstine Reiner et l’insensé


La peinture, aujourd’hui, n’a-t-elle pas encore ce qui « résonne » en elle (Un peu comme l‘âme est quelque chose d’immatériel chez l’humain.), depuis cette polémique liée au raisonnement ? Sinon de s’en passer, travaille-t-elle maintenant sur ce qui lui fait défaut, l’intellection d’une parole à démontrer ? Le reflet d’une réalité tangible, controverse de l’âme désincarnée. L’urgence d’une telle peinture serait d’avaliser ce raisonnement en créant, depuis la peinture qui cherchera la représentation, un objet de désir, une sortie imaginaire pour trouer ce faux semblant de réel, par une certaine atomisation visuelle, pour permettre aux gens qui regardent en passant devant la toile, comme happés et sonnés, voir « sommés » par le tableau, d’organiser leur propre récit à défaut de pouvoir symboliser celui-ci.


L’artiste nous entraîne donc à soudainement postuler pour une approbation ou un rejet de cet étrange arrangement qui au premier abord semble insensé (petit retour d’une mémoire qui passe par Picasso). Kirstine Reiner Hansen plombe les références artistiques pour laisser le champ libre aux arrangements musicaux, aux rythmes à gérer de notre culture « axée sur les médias numériques » et l’inconditionnalité d’une dépense visuelle qui fragmente notre acuité visuelle, et par là notre jugement perdu dans une ressouvenance, une immémoration du réel. L’artiste travaille sa condition sociale et le conditionnement humain : « Référence visuelle, association d’éléments historiques de l’art, des peintures de la Renaissance aux modernistes dans des peintures de type collage le papier peint de Picasso pourrait servir de fond, un membre de Bouguereau est attaché à un modèle de Vogue. ». Notre lien au monde serait alors déformé, irreprésentable aujourd’hui, sauf à nous livrer en pleine face à un détournement conflictuel commun, tout en préjugeant d’une subjective association, de la turbulence d’un sens caché où l’intérêt requis d’un regard soudainement lié au réel, devant la toile obscurcie et lumineuse à la fois promet un dur combat des forces forme/couleur.


Kirstine Reiner Hansen domine son sujet en nous délivrant de ce subterfuge qui consiste à opposer l’abstraction et la figuration, polémique ici éteinte dans un champ « confondant », pour un temps perpétuel de la Reconnaissance l’identité, ici encore, démontrant l’inconfortable révélation d’une peinture qui détient le pouvoir insensé de signifier ce qui se dépose en nous d’insoutenable face au danger de « déviance » de délire qui nous caractérise et nous entraîne dans une réalité qui distend le rêve improprement appelé imaginaire !



Thierry Texedre, le 1 octobre 2023.


Kirstine Reiner Hansen

artiste peintre et vidéaste

née à Odense au Danemark

vit et travaille à Carmel en Californie aux États Unis













samedi 16 septembre 2023

Le corps psaume, le réel en déshérence


Et si le corps ne disait plus que la parole à trop en dire de ce corps défait par la vue qu'on en a.

On entre dans un tintamarre qui  désarticule la sourde dépendance,  l'entrelas, entre parole et chimères du temps saturé, pour faire gronder l'esprit. La parole contre ce corps qui se délite à mesure que celle-ci s'évanouit. Ça chante encore, l'esprit tiraillé et l'esprit chancelant, à cause de cette mise en mémoire du genre humain.

Tout ce que le genre humain proclame haut et fort sur sa capacité à reconnaître le vrai semble alors  caduque et voué à l'illusion, à l'illumination, à la croyance, parce que ce corps inique garde en lui l'impossible résolution de son dire.


La beauté n'a d'égale que la forme disloquée du réel. 

Le chant sinueux du réel songe en rêves irréels.

Si l'incertain résiste au réel c'est pour sonder l'inconcevable.

L'insituable c'est ce qui se passe quand du réel on sort.

La soudainneté est le seul idiôme qui sied à toute résolution de la mémoire, et c'est là, le réel qui commence à parler.

Si parler cause l'errance, la déshérence s'octroie le droit de montrer le réel, comme droit incompressible à parler depuis cette absence de réel.

Parler c'est déjà avoir une vision du réel.


Thierry Texedre, 

le 16 septembre 2023.


mercredi 9 août 2023

Absorpsion










 






Absorption


C’est l’asphalte de la déploration

le travers du con singulier s’ouvre

voilé par l’esprit libre de la peau

le sang démonté se sauve vulgaire

à cause du ventre trop chaud et ivre

ça saute dedans ça rugit en traînées

en risques obscènes les sens délivrés

le salaud croit qu’il est déjà trop tard

il ou elle glisse tout du long sur le lit

vertigineux de la fleur des âges nacrés

l’ourlet le fruit consenti de l’ingénue

si le sang monte la descente presse

pourquoi le temps conte des histoires

le corps tremble à cause de la chaude

la tête tousse là haut il pleut des larmes

l’évasion s’évanouit à cause du jour

depuis l’infiniment petit clou planté

pour distendre les nerfs de l’enfanté

dehors partout ça ronge et rumine

des phrases encéphales avant de partir

le coin de l’œil exacerbé devant le né

qui tient le nu pour un atomique cri

une singulière et inexplicable dérive

ça commence à rouler des pneus irrités

le couvent est en cloque dehors il prie

les chaînes de Dieu sonnent l’hallali

le printemps des étamines virtuoses

que la peau arrachée au temps dérive

rôde aux abords de la poésie déchirée

de la poésie qui colle aux mouches

le feu électrique imprime l’au-delà.



Thierry Texedre, le 9 août 2023.



 Christina Quarles (1985-) Chicago, Etats-Unis

"Pose ton amour sur moi"

acrylique sur toile

182,9 x 152,4 x 5,1 cm









dimanche 23 juillet 2023

Les plages de la peau

 






























Les plages de la peau

Si ce n’est par enchantement que se soutiennent une peinture et la peau, quoi d’autre tente cet enfoncement du visuel, sinon ce qui se marque d’une attirance ; une parole, celle, peut-être d’un non-dit. L’artiste se fourvoie contre l’obscur désenchantement de la représentation. Martha Edelheit semble reconnaître l’insaisissable occurrence qui sourdement s’émancipe dans ses peintures.

Si l’artiste féministe dans les années 1960 en abordant le désir féminin au plus près du corps, de la peau, dans un retournement spectaculaire du corps à la peau, et de la peau à la toile, on entrait alors dans cette symbiose corps-toile en invisibilisant l’essentiel du raisonnement pictural ; c’est à dire sa représentation en utilisant des objets de la vie d’une femme au foyer pour ouvrir l’acte de peindre au réel en le doublant, en l’étirant vers l’extérieur. L’artiste se sera ultérieurement mise en défaut pour recentrer ce sujet de l’emprise en peignant des corps tatoués jusqu’à l’illusion d’une imagerie impossible, d’un dessein sans coupure avec le temps. C’est le temps du tatouage qui se dépasse dans la « scarification » visuelle. L’origine de tout art ou l’origine de son sujet qui parle un temps qui n’est pas le sien, et c’est pour ça que ce destin est celui du dessin sur l’intériorité en prise avec le désir et le plaisir par la douleur, jeux sadomasochistes du corps qui cherche un autre « esprit » pour poser sa « croyance », son temps de vie. Et puis maintenant on en arrive au plus près d’une déviance du temps présent dans une grande représentation des êtres possédés par la mise en lumière de l’animalité condescendante des corps étalés pêle-mêle entouré d’animaux domestiqués. Quelle porte de sortie de l’être parlant autrement que par cette chair embaumant tout l’air d’une peinture recouverte et/ou à découvert d’une peau, le peint qui dévisage celle ou celui qui regardent l’imposture de leur paraître.

D u corps à la toile, de la toile à la peau, il n’y a qu’un pas à franchir. C’est là que s’impose et s’interpose Martha Edelheit quand elle fonde sa remise en question du désir de la femme dans une vision, des plages sans fin du désir inapproprié de chacun sur l’esprit vacant qui sort, sortilège oblige, du ventre de ce « tout social ».



Thierry Texedre, le 23 juillet 2023.

 

Martha Edelheit (1931-) artiste peintre née à New York, vit et travaille à Stockholm, Suède





mercredi 5 juillet 2023

On est entré en guerre contre une peinture qui ne vient pas









































                                    On est entré en guerre contre une peinture qui ne vient pas


Conservatoire de la brillante voix

l’ultime insidieuse et tonitruante

exaction de la parole qui entre seule

par les pores de la paroi atrophiée

partout où ces bruits courent et couvrent

l’indécence du corps dénoué en lueur

de celle qui s’ouvre au ventre de la vie

d’un vivant orifice entrain de se taire

à cause de la voix qui enfreint enferme

ce corps qu’un pleur désordonné tait

quelle guerre s’invite au repas du vrai

à trop découper en plaies le corps nu

et recouvert de ces paroles en trop

c’est l’antichambre de la douleur

de ces os recouverts de chants indécents

suivant une bataille hermaphrodite

de l’être séparé de l’âme envoûtée

à cause de la voix qui s’est séparée

pour s’identifier au train train verbale

le temps pressé par le verbe s’enfle

se contracte s’éternise à l’infini

pour que respire cette croyance

c’est le protocole d’une mémoire

le temps pressé voilà donc la dépression

la cause incessante du risque préparatoire

d’une peinture dessin en taches électriques

contusions d’un dire divinatoire de l’autre

qui touche à la perspective avant l’heure

en vrac un sac en porte à faux trop lourd

à porter s’ouvre pour laisser voir le monde

sombre qui reste dans l’oubli figé fiché

au fond sans qu’on sache ce qui s’y trame

c’est qu’on cause de ce qui s’y trouve

sans savoir de cet objet quelque autre chose

la chose n’est pas l’objet mais sa possession

la peinture est cette chose qui veut en finir

avec la guerre contre une peinture

qui ne vient pas à trop causer du monde

le monde d’une déchirure de la chair

poussée à jouir de l’objet d’une possession

de la mémoire naissante du lieu de la peinture

dure réalité de la guerre ignominieuse

du désir caressant de la paix qui tourne

ce réel en dérision pour démonter

ce lien cette voix cachée du temps

qui met en scène la vie d’une peinture

celle-ci se retourne immanquablement

en vertiges ourlets qu volent la peau

la torturent jusqu’au vieillissement

jusqu’au silence mortel d’une voie

saisissante qui se couche altérée

la chair creuse ces sillons immuables

d’une guerre qui infeste la peinture

si la peinture ne vient pas c’est qu’elle voit

venir sa raison d’être qui ment son destin

et l’animal en touche revient faire parler

de cette peinture en ostentation

en suspension du rêve qui vient lui

en une constante détention verbale

au plus près de cette divination passée

animal qui pose le problème d’un lieu

celui qu’une peinture ne cesse

d’ensemencer d’une descente aux enfers

la parole s’y plaît à coudre la peinture.





Thierry Texedre, le 3 juin 2023.



Tessa Mars (1985-)

artiste plastitienne Haïtienne

vit et travaille à Port-au-Prince






 

samedi 1 juillet 2023

Le consentement à la conscience

 












































De l’obscur mécontentement ou le consentement à la conscience.


Entrer en hypostase, voilà le grand démiurge en action ou de la quintessence obligeant à revenir sur ce que toute religion tentera de camoufler, soit de l’indistinction entre animal et humain. Ce mécontentement n’aura de résolution qu’à la période post-industrielle où l’humain commencera à faire souffrir ce corps en reconnaissant à la folie cet état de droit précédant en cela l’audace Freudienne, juste le temps pour un certain Gustave Jung d’y voir l’entourloupe qu’un sujet isolé n’aura de cesse d’extraire de son inconscient. L’obscur désenchantement de la conscience. Ce serait tel qu’une religion porte l’esprit, tel qu’une spiritualité observera que le souffle marque une dépression verte parce que l’animalité retentissante d’une souffrance subjective n’aurait alors de sens qu’à découvrir, qu’à s’ouvrir à un inconscient collectif plus proche du vivant pour subvertir l’obscène désenchantement de la conscience.

Lucie Kerouedan donne à voir en peinture ce que la vie, le vivant, rencontre de différence entre l’animal/l’humain et le végétal/le minéral. Non sans chercher ce qui complexifie le contexte contemporain quand on a affaire à la solastalgie ; s’il y va de la détresse existentielle ou psychique face aux changements climatiques ou s’initie une certaine « descente » de l’esprit, sa petite mort annoncée. Lucie kerouedan dans une mélodie ascendante, propose une montée de l’esprit, l’anabase d’une spiritualité. Si la peinture montre ces figures dans une lutte incessante, c’est pour mieux insister sur la représentation qu’une conscience produit quand le rêve s’y adjoint. L’humain et sa résilience escamotant tout son consentement à la conscience. Peindre serait alors une empoignade avec le mal pour convaincre l’animal qui l’enferme, de l’entraîner dans ces dérives de la conscience usurpatrice.

L’âme éclairante, le souffle, resterait en suspension telle une vie en devenir sur laquelle Lucie Kerouedan travaille dans sa peinture, traversant ainsi le mirage obsédant du visuel. On rencontre par hasard peut-être Lucian Freud au détour de l’histoire, depuis notre vue aléatoire de la peinture.



Thierry Texedre, le 22 juin 2023.


Lucie Kerouedan (1990-)

artiste peintre française

née à Rennes, France

vit en Bretagne, France