vendredi 22 avril 2016

Lettre







Lettre *

L'air du temps

Je pleure cet instant dédié au risque de la disparition, ce vol irrésistible en sauts, m'esclaffant que rien ne vaut ce regard en suspension dans la poussière de l'air respiré. J'aspire au repos paisible qu'un train d'enfer rapporte du fond des âges, par tant d'amertume, tant d'inexistence, et que ce corps douloureux enveloppe. Tour de vis de la chair qui bloque, fracasse, enferme par tous les temps, pour émasculer ma mémoire. En feintes, l'air du temps me joue des tours, jusqu'à me couper la peau en profondeur, pour laisser sortir le malin qui s'évertue à jouir d'une probable diminution de mon amour pour l'autre. Je rase les murs dehors, et dedans ma chair se remue pour essayer de passer outre en sortant, pliée depuis le fond, pour me laisser jouir l'éternité que ce corps fatigué m'interdit. J'ai mal aux mots jusqu'à les faire sauter, il faut bien encorder pour tenir bon, c'est la seule façon d'extraire la vérité de cette inépuisable intensité du drame de la vie. Relique du désespoir, je crois de plus en plus à cet appel du dedans qui m'indispose, me rétracte, m'emporte depuis la fournaise du clapotis du sang,  debout, pour me risquer à une autre parole ; serait-ce un schisme avec "ce croire" ? Outrage d'entrer dans l'exacte opposition avec un regard amoureux qui immole mon âme, jusqu'à noyer mes certitudes sur la mort. Depuis les débuts de la vie osée, je « crois » à courir après ce qui montre la mémoire pour identifier le nœud la « sortie » d'un présent sans fin. Pleurs de l'inséparable ouverture au monde du corps qui me hante, m'esclaffe, m'introduit dans la noirceur inventée d'un lumineux départ de l'envie en frasques fistés par l'écartèlement des membres jusqu'à la douleur extrême de la fin. De cette foutue fournaise qui m'inocule la mort en catimini, j'ergote sans arrêt, sous l'emprise d'une autre servitude ; la reconnaissance de l'autre, pour m'immerger dans l'indifférence du même. Pouvez-vous m'interdire de croire, ma peur est immense, croire serait au bout, cette chute dans l'immensité de l'infiniment vrai, de la détermination à n'être qu'à condition de n'exister qu'en paroles raccourcies par l’œil de l'étreinte. Sachez que mon mal est ce tremblement interdit depuis l'os qui frôle la cassure.


Thierry Texedre, le 22 avril 2016.

*Ce texte est supposé être une fiction.