mardi 26 mai 2020

Stratification du sens, la Vision



Stratification du sens
La Vision

Sons de l'inaudible
vers quelle clôture
le temps se met-il
en vrille pour finir
finir ce qui a été lu
en dire du sens éclos
vertige de la dictature
qui commente sa vie
virtuelle pour un corps
qui quitte l'immatériel
l'immanence du dire
en terre desséchée
jusqu'à ce que ce sang
sans répit réplique
l'annonciation d'un cri
tremblement tellurique
du corps caverne exclu
du son de l'âme mortelle
ce son supplique chair
et révélation de la fin
des temps inhumains
vol acerbe du ventre
de la terre tendue
jusqu'au risque
véridique compression
étalement du vivant
sur une hétérogène
explosion de la vie
sur la terre traumatique
du corps dit animal
à cause de ces sons
dont on dit l'écriture
ultime mort du vivant
danse du vivant
qui croit à ce croisement
entre animal et humain
ordre dépressif du temps
qui quitte la sphère
animalité pour une ère
de la mémoire électronique
jetée en pâture aux rebelles
du temps asymptomatique
de la représentation
réplique de la chasse
et de l'intrusion
de ces corps vidés
impression en aires
pour un corps dénaturé
une culture qui se presse
elliptiquement belle
endormie pour l'éternité
devant ce sacré
encore livré aux astres
pourvu que le peintre
sorte de ces effarantes
inquisitions du dire
pour relocaliser le vivant
donner à voir ce néant
ce blanc désavoué
et y déposer le pire
l'insoutenable légèreté
de l'enfantement.


Thierry Texedre, le 26 mai 2020.









dimanche 10 mai 2020

D'un paysagé au blanc





























D'un paysagé au blanc



La peinture ici s'offre au regard en insistant sur l'inattendu, je veux dire par là qu'il y a quelque chose d'anormalement intérieur au vu d'une intrication des formes qui s'inaugurent au blanc dont on mesure la réserve. Quelle expansion des couleurs vers leur obsessionnelle obstination à monter en gamme pour disperser le regard, le renverser dans un paysage sans fondement réaliste. On oserait presque distinguer un quelconque essor, ayant un rapport, un sens avec le figuratif. Mais l'étant se montre oppressant, voir même interchangeable au milieu du blanc qui s'offre comme conviction, être, pour enfermer la forme dans ce qu'elle a de couleur au plus près de l'intériorisation d'une vision ; couches qui s'agglutinent, s'éternisent pour un temps, et ensemble semblent se couper de leur passé, de leur intellection. La peinture d'Isabel Michel sort de cette abstraction qui use de l'improvisation, pour entrer en résidence avec l'intériorité d'un corps futur, le corps d'un paysage intérieur. Le rêve entre et sort du tableau dont les formats semblent varier autour d'une conspiration avec les mesures du corps humain. Un flirt dirigé vers l'exploration d'une intense connivence avec la chair dans ce qu'elle a d'une indécence devant la couleur. Le risque d'une telle peinture reste lié à la rencontre qu'elle assume d'un public qui court après l'inconnu, l’incontrôlable réminiscence d'une étendue de la peinture sur le cours du vivant escamoté par un réel en gestation. Et puis pour ainsi dire le temps de passer devant ces belles toiles amarrées à leur conjointement, un passage d'un tableau à un autre, comme si rien ne pouvait les séparer, lumineuse rétroaction d'une peinture qui signe avec une intelligence, un futur sans finitude.

Thierry Texedre, le 8 mai 2020.



peintures de Isabel Michel (1956-)
artiste peintre française
vit et travaille à Paris








samedi 9 mai 2020

Par-delà le sacré




Par-delà le sacré

Entrée dans ce sacré
commémoré par l'audition
l'austérité du divin
manqué depuis la parole
piquée d'un corps dissout
depuis la petite mort
de Dieu sa perte chassé
et ce damné croyant
par l'insidieuse occurrence
du fond incertain
de l'âme occultée
de la foi outrepassée
s'en va monstre
voilà l'art installé
pour des siècles de l'être
de cette indistinction
qui s'offre telle une vie
après ta mort ô Dieu
pourquoi cette mort drame
et partout la lamentation
sordide sujet jeté
en pâture à la dépense
démence qu'il pense par
cette verve du non-dit
quel masque l'interdit
le soumettre allongé aux plis
du temps de la procréation
le temps d'enfanter
un autre désir des sens
l'indécence du ventre
de la terre qui remonte
partout sort de ce retour
le temps de la nativité.


Thierry Texedre, le 9 mai 2020.

Hannah Höch (1889-1978)
« LUI et son milieu » 1919
aquarelle, crayon et encre de chine sur papier.








jeudi 7 mai 2020

J'aurai bien changé la vie

















J'aurai bien changé la vie

L'oiseau est-il dans les nuages
il file aux yeux du temps
ici le poisson soulève l'eau
pour entrer dans la vulve vue
le vagin geint la tête dans les nuages
porteur du fil convulsif du né
qui couche la vie génitrice
qu'est-ce qui défonce
au creux du ventre l'envie
de gratter de dévaler la pente
pour sauter sur la file d'attente
des corps déposés en perles
sur cet univers métamorphosé
les lèvres grossies par l'effet
de palpation des seins
à la loupe du lait mousseux
qui baigne dans l'envie
de jeter ni l'un ni l'autre
des sexes qui se mélangent
l'oiseau sort pour prendre
le bec au cri douloureux
son envol sur l'image ulcérée.


Thierry Texedre, le 7 mai 2020.

peintures de Delphine Cadoré (1972-)









dimanche 3 mai 2020

Messe pour quelques pleurs
























Messe pour quelques pleurs

Le temps s'est retiré du dehors
touché par le regard de la prière
divine étendue d'un drame futur
sans cesser la lumière s'étend
partout où la voix se déverse
on entend là-haut les voiles
de ces pleurs damnés au réel
lente agonie du ciel partout
travers des vitraux délivrés
pour montrer la lumière la vie
qui touche un gai savoir lueur
fond gisant des voix sans lieu
vient ce silence vide aux prières
du temps rendu par l'impuissance
aux dérives du corps chanté
du corps désenchanté par l'oubli
mémoire de la même révolution
intentée aux lieux du dehors
hauts lieux de la croyance
recouverte en ces temps du dire
par quelle rencontre de ces pleurs
vont naître l'intime résolution
l'enfantement l'amour la lumière
béatitude de ces rêves sortis
du fond infini de la chair
par le sang majeur des pulsions
jubilation du ventre de la terre
qui soit l'immortel amour
quittant le fondement de l'homme
pour se jeter aux messes
messagères de la résurrection
de ces cendres de ces feux
sans désir pour essaimer
par le vertige de l'élévation
la puissance du jour à la gloire
du réveil au plus loin
au plus près de la parole
respiration sans nom aux pleurs
touchant l'âme laisse l'anamnèse
aux plaies sans dieu ni loi.


Thierry Texedre, le 3 mai 2020.

La leçon d'anatomie du Docteur Tulp (1632)
Rembrandt (1,7 m x 2 ,16 m) huile sur toile