Sur
quelque passage entre les peintures de Natalie Lamotte
Peut-on
encore tenter une approche des peintures de Natalie Lamotte, sinon
d'entrer dans une pesanteur dont on ne sortirait plus qu'au risque
d'essouffler la vue. or
La vue,
voilà bien là ce qui manque quand on regarde les peintures rouges
de Natalie Lamotte.
D'une vue
qui en a assez d'essayer de circonscrire la couleur des formes
informes et impropres à essayer une mémoire dont les signes
intangibles vous poussent au respect, puisque dans l'attente d'une
forme de reconnaissance à y voir d'une vue masquée, une vision de
ce que peut libérer et livrer une temporalité de l'effacement d'une
représentation consommable.
Pour s'y
retrouver dans ces labyrinthiques dysfonctionnements de la
représentation, ici telle qu'un essai serait impossible à
restituer, vu que ces toiles montrent au blanc le rouge comme
extension d'un pouvoir, celui d'entrer en résidence avec
l'architecture intérieure du vivant, je veux dire par là ce qui vit
n'ayant de ressource qu'à n'entrer jamais en communication avec la
pensée sauf à restituer cette formation de glissements, d'effluves,
d'effluents, de glissements sans fin, vers autre chose que cette
présentation d'un format au peint.
Viens par
là le temps de regarder les variations peintes, dont on devine les
attitudes de tons plus clairs, aux roses délicats, détournant les
yeux lentement du temps bousculé par le présent. On essaye par tous
les moyens d'en extraire la substance. Mais jamais ces formes,
déformant notre regard, n'agissent au seuil d'un entretien avec le
peint sans le dire.
Le blanc
n'est pas là pour vous faire croire à une quelconque figure qui
risquerait dans votre esprit d'en rajouter de ces formes dont on
saurait reconnaître l'existence ou la surréalité.
Natalie
Lamotte n'aura de cesse d'exercer sa maîtrise pour essayer que nous
ne nous montrions plus dans la mise en forme d'une réalité
échafaudée à partir de signes juxtaposés, pour imiter l'écriture,
et peut-être pourrions nous nous poser le temps d'une écoute
musicale.
Si les
toiles posent la forme c'est pour restituer au regard sa par de réel.
Le réel, voilà la belle affaire, n'y a-t-il jamais eu de réel qu'à
ne jamais user de cette mémoire des formes, sinon à passer d'un
acte à un autre sans jamais montrer ce qu'un temps présent croit.
On passe
d'un rouge à un autre rouge révolté à tout jamais de ne pas se
poser, sauf dans le blanc qui s'y noie s'y perd s'y retrouve au
risque de s'évader encore. Et puis tant pis pour nous, si on voyait
quand-même des fragments de chair, ici une lèvre, là un sexe, et
là encore une lointaine forme céphalopode, le végétal aussi. Tout
y passe dans notre déambulation le temps d'une exposition.
Si Johan
Mitchell et Francis Bacon nous montrent la voie pour mieux y voir la
peinture de Nathalie Lamotte, peut-on en dire autant d'un Dominique
Thiolat, sinon qu'il restitue chez Natalie la constance de la
couleur, une voie qui parle haut et fort pour en dire quelque chose
du mouvement de la couleur quand celle-ci n'a plus son bord pour
s'apprivoiser, se montrer et exister au réel.
Une
peinture qui se suffit, autonome en tant que toile, mais aussi il y a
quelque chose à voir d'un déploiement linéaire, en séries(de
l'extériorisation qui aliène le sujet à l'intériorisation qui
porte sans fin cette pratique de l'être).
Thierry
Texedre, le 25 juin 2020.