jeudi 23 novembre 2023

Marc Rothko, plage

 

 
 
 
Plage
Au loin le long train-train du travers l'espèce de certitude qui nous ronge de l'intérieur voilà ce qui nous plonge dans l'indifférence de ce corps usurpateur sali par l'insupportable excrétion du ventre maudit de loin en loin ça s'use si on regarde hors du corps-cavité hors de sa gangue de gueule insalubre et lubrique puant l'a-pesanteur du sexe moribond insatiable enfournant de son foudre la tête dans l'anus pubien du crâne volubile du crâne incendiaire qui croît à mesure que ce liquide séminal remplit la gorge trop profonde à sec la discrétion semble de mise ici tout près plutôt au plus près d'un visage aux yeux troubles puisque l'autre n'y voit que du feu il retourne à l'envers sa touffe-cheveux forte pilosité derrière devant discutant à ne plus savoir rien de ce qu'il chante en entonnant sur un corps étrange un corps sans nom ni tuméfaction lisse un corps ivre qui vocifère la langue impossible avalant la chair totale qui va s'interposer la voilà à une parole ignifugée celle de la chair de l'âme de l'autre sur cette plage de sable fin et doré trop chaud pour s'y allonger. La peinture nous inocule, indifférente à la vie, cette soumission au risque, face au néant, au chaos des choses. Il y a comme un malaise devant la peinture qui nous emprunte, vole nos illusions pour nous illuminer alors. Tranche de vie depuis une plongée dans l'essentielle monstruosité du dedans entrain de remplacer ce qui dehors est hors de notre portée. Ouvrir et refermer l'opercule informe du temps, c'est faire une pause, se poser là où tout devient possible d'un désir avoué, depuis l'astre mortifère, par delà les usurpations de sens. Ça tremble lentement devant ces espaces infinis aux tréfonds de couleurs ancestrales on croit remonter aux sources de cet inconscient inhospitalier c’est la « carnaissance » « l’incandescence » révélée revisitée en intriquant l’histoire d’une peinture et celle d’une plongée improvisée et inquisitoire c’est là qu’une suspicion s’installe se met en mouvement comme pour nous démontrer que la peinture n’a rien à voir avec ce qui s’y voit depuis l’interminable vélocité du regard en attente de plaisir pour cacher sa mise en abîme de la pensée depuis ce déplacement temporel cette réalité qui nous met en émoi tant pis pour ce qui se trame du réel peint par l’artiste ici Marc Rothko.
 
Thierry Texedre, le 23 novembre 2023
 
 
 
Mark Rothko, 1961
Orange, rouge, jaune