samedi 1 juillet 2023

Le consentement à la conscience

 












































De l’obscur mécontentement ou le consentement à la conscience.


Entrer en hypostase, voilà le grand démiurge en action ou de la quintessence obligeant à revenir sur ce que toute religion tentera de camoufler, soit de l’indistinction entre animal et humain. Ce mécontentement n’aura de résolution qu’à la période post-industrielle où l’humain commencera à faire souffrir ce corps en reconnaissant à la folie cet état de droit précédant en cela l’audace Freudienne, juste le temps pour un certain Gustave Jung d’y voir l’entourloupe qu’un sujet isolé n’aura de cesse d’extraire de son inconscient. L’obscur désenchantement de la conscience. Ce serait tel qu’une religion porte l’esprit, tel qu’une spiritualité observera que le souffle marque une dépression verte parce que l’animalité retentissante d’une souffrance subjective n’aurait alors de sens qu’à découvrir, qu’à s’ouvrir à un inconscient collectif plus proche du vivant pour subvertir l’obscène désenchantement de la conscience.

Lucie Kerouedan donne à voir en peinture ce que la vie, le vivant, rencontre de différence entre l’animal/l’humain et le végétal/le minéral. Non sans chercher ce qui complexifie le contexte contemporain quand on a affaire à la solastalgie ; s’il y va de la détresse existentielle ou psychique face aux changements climatiques ou s’initie une certaine « descente » de l’esprit, sa petite mort annoncée. Lucie kerouedan dans une mélodie ascendante, propose une montée de l’esprit, l’anabase d’une spiritualité. Si la peinture montre ces figures dans une lutte incessante, c’est pour mieux insister sur la représentation qu’une conscience produit quand le rêve s’y adjoint. L’humain et sa résilience escamotant tout son consentement à la conscience. Peindre serait alors une empoignade avec le mal pour convaincre l’animal qui l’enferme, de l’entraîner dans ces dérives de la conscience usurpatrice.

L’âme éclairante, le souffle, resterait en suspension telle une vie en devenir sur laquelle Lucie Kerouedan travaille dans sa peinture, traversant ainsi le mirage obsédant du visuel. On rencontre par hasard peut-être Lucian Freud au détour de l’histoire, depuis notre vue aléatoire de la peinture.



Thierry Texedre, le 22 juin 2023.


Lucie Kerouedan (1990-)

artiste peintre française

née à Rennes, France

vit en Bretagne, France  








D'une impossible illusion dans le tableau



































 D’une impossible illusion dans le tableau


Dans un monde où se soulèvent tant de rêves, illusions qui montrent le chemin de la détermination à vivre, il en est une qui semble ne pas prendre le même chemin. Et si la peinture parlait de ce qui n’est pas possible ? La mort, y tient-elle cette partie prise où la vie n’aurait d’autre choix que de montrer cette impossible illusion qui la circonstancie, la rencontre dans un étalement pictural ? Gabrielle Boyd nous émeut ici, pour ses prises de bec avec la mort, pour dissuader que de peindre peut faire sens quand la peinture se reconnecte avec le vivant. Boyd a d’abord illustré magistralement les rêves décrits par Sigmund Freud dans un ouvrage sur l’interprétation des rêves. Ce fut là le départ pour un long voyage entre le réel et ces configurations propres aux rêves, qu’ils soient ceux nocturnes ou diurnes par la suite. On remarque déjà ces titres choisis pour s’initier à la peinture : « Une femme avec un enfant qui a un crâne difforme. » , « J’ai uriné sur le banc ; un long jet d’urine rince tout ! ». Par la suite L’artiste recherchant toujours l’inconfort dans son travail, nous offrira des peintures aux formes structurées de sujets portant attention et désintérêt dans la même composition qui est souvent entrecoupée par des formes géométriques des croix, barres, qui marque une certaine distanciation avec les sujets représentés ; et où l’on a de moins en moins le pouvoir d’y voir certaines connexions entre eux. « Ces relations sont pourtant magnifiées parce qu’elles ne peuvent être séparées d’y voir la chair, l’esprit qui les organise, et l’espace qui les contient. » Les titres des tableaux ont un lointain usage avec leur finalité. N’y voit-on pas par là, un certain aspect et un usage de la perspective Euclidienne transposée à l’époque contemporaine ? Projections qui posent la question des couleurs évanescentes chez Gabrielle Boyd, où ses choix contribuent à entrer dans un « désir » invisibilisé dans notre réel, et montrer qu’il devient possible d’y lire la désillusion à désirer cette illusion, car l’artiste ici, montre bien le possible, notre possible à voir entre ces illusions qui fractionnent ses peintures.




Thierry Texedre, le 15 juin 2023.



Gabrielle Boyd

artiste peintre et illustratrice anglaise

née à Glasgow

vit et travaille à Londres, Royaume-Uni


 






La peinture et le refus

 


























 La peinture et le refus


L’horizon n’est là que pour montrer de la peinture qu’une infime possibilité du présent. L’artiste pousse l’horizon comme si le sujet allait refuser ce qui se trame aujourd’hui d’un futur en train de se montrer déjà sur la toile. La ligne d’horizon est souvent présente dans les peintures de Didier Richter.


Ces figures visibles sur le devant de la toile sont brouillées, comme désarticulées, ressemblant à des corps morcelés et peints ; telle une bande dessinée où les paroles vous sont transmises dans un minimum de lecture par les titres des expositions et ceux de chacune des peintures. « L’artiste peint d’abord les champs de couleur avant de tracer la composition, permettant à son utilisation dirigée de la couleur de structurer l’œuvre, plutôt que la ligne. » Les aplats sont ce qui permet à l’artiste de passer d’un monde à l’autre, celui d’une figuration dans l’histoire à une abstraction de la réversion. Là encore on n’en reste pas aux figures sinon, qu’il faut leur permettre d’endiguer l’abstraction trop encline à finaliser un travail sur la propre humanité.

Daniel Richter n’en peut plus. Il voit cette folie devant lui se dessiner. De ces figures qui ressortent et qui semblent tomber sous le sens. On croirait « les demoiselles d’Avignon », mais découpées, hachées, multipliant des désaccords et des déchéances humaines, des coupures à la Matisse par la couleur vive des scènes. À ce jeu là aucun corps n’y résiste. L’attraction en est à son comble. Elle est telle que notre regard en prend plein les mirettes ; c’est comme des coups donnés à la boxe. Oui, le peintre boxe. Oui, la peinture est en plein dans le match. Le jeu, en vaut-il la chandelle. Le peintre nous envoie des déferlantes de formes et de couleurs qui se lient alors par des superpositions de l’une par l’autre sur la toile. Alors même qu’on voit entre les coups quelque chose qui nous interpelle. Quelque chose qui nous figure la paix un court instant. La mémoire, nous joue-t-elle des tours ? On voit de toutes les couleurs comme on dit, c’est avant le chaos, la fin. On passe alors notre chemin espérant un regard plus enclin à l’apaisement. On le retrouve pourtant sur chaque peinture, sur la beauté et le ressenti qu’elle nous procure malgré cette contamination interne, ce refus délibéré d’accepter l’entièreté de la peinture. On se ressaisit pour essayer de remonter le fil du temps. La peinture passe son temps elle, à nous battre en brèche, elle nous devance. Il semblerait que Daniel Richter ait gagné la partie. C’est une histoire de trauma. Si les couleurs vives traversent et imprègnent notre intime conviction qu’il s’agit d’une peinture de l’intériorité, d’un parcours intérieur qui nous taraude ; de le voir, sur ces peintures en plages flottantes, nous nous empêchons de garder une certaine conscience de la plainte.


Daniel Richter intervient par sa peinture, sur notre fonctionnement vital, notre marche vers quelque chose de l’indiscrétion, tel un contrôle de l’hystérique parlant qui s’effondre à ne pas voir ce qui se trame de la peinture.


« La peinture ne naît pas que d’une incidence, mais elle meurt sans incidence. »




Thierry Texedre, le 6 juin 2023.



Daniel Richter (1962-)

artiste peintre allemand basé à Berlin