vendredi 26 avril 2024

La peinture en trop

 








































 La peinture en trop



Touché par l’insupportable exposition

du sacré la peinture a peint cette lisière

ce qui traverse toute expiation du déchet

de l’indivisible rhétorique de la parole

vers une texture plus enceinte de la vue

l’art alors se met en scène incidemment

démontrant que la parole n’y suffit plus

et que ce déchet à trop le répéter en signe

figural montre que ce démantèlement lie

ce qui pense à ce qui se mesure au réel

le temps alors s’alourdit en réserves vides

un réservoir s’en sortant isolément retors

d’une parole qui vacille peinture trace

pour contourner les textes sacrés violés

du viol de la fin de Dieu dans la poésie

corps psalmodique du ventre inique de Dieu

indice de la pire inquisition qui soit entendu

de la peau incubatrice du désordre des maux

corps insoutenable entrain de secouer la face

déchirée d’un dieu décomposé en tripes et

cœur et peau d’un charnier du plein chant

de la gorge trop profonde pour laisser ce cri

sortir droit tel un sexe viril avant un jet jeté

en pâture aux vices de ces êtres décomposés

en jachère devant le tremblement du peint

qui dans l’austérité de l’ignorance se débat

informel et récréatif pour ceux qui sautent

sur les couleurs à trop aimer le jeu de jouir

mordant sur les voix inaudibles qui chantent

parce que le temps existe encore démembré

ce qui peint vaut ce qui voit l’esprit du temps

du trop plein en sourdine sort en battements

l’interminable élocution en récitatifs infinis

du monde grandissant de ces aires irradiées

par l’effraction qui monte l’irruption en vol

de la détermination d’une vision ravageuse

la peinture s’étend s’étire se joue de la vue

pour mieux dépenser l’inquiétante étrangeté

qui monte de ces entrailles exorbitantes

juste pour en découper la peau jusqu’au

secret immaculé de la vie quand la vie voit.




Thierry Texedre, le 26 avril 2024.
















  


 


mercredi 17 avril 2024

De l'abstraction à l'esprit d'abstraction










































De l’abstraction à l’esprit d’abstraction


Liliane Tomasko initie ce transfert digne des plus grandes artistes contemporaines, parce que, dans la peinture, ce qui sonne faux d’une mise en avant de ces exercices à s’y essayer de toucher à la grotesque illusion d’invisibiliser l’intime spatialisation de la nature, ou ce qui revient à l’extériorité ; dans la peinture actuelle, c’est ce qui tourne en dérision ce qui semble n’être pas encore le chemin rêvé de l’abstraction.

Pour tout dire, on pourrait se contenter de cette prolifération d’exercices intellectuels à reproduire tout ou partie de lignes et de couleurs, d’initier le regard au risque de soustraite cette même pensée au tremblement des choses acquises ou de nommer sans cesser leur dissolution les choses dont on sait que de ne pas les nommer ça porte leur appétence au zénith de la mort de toute création, à la retenue du risque, du risque de s’en prendre à la peur de ne jamais aboutir au désir caché, s’il est trouvé au milieu de nulle part. L’invisible s’étend donc partout où le risque, le rien, l’insupportable résonance des lieux sans le raisonnement, et la peur de ces lieux sans liens, là où ça sent le dénaturer, le chaos d’une impossible intrication verbale, là seulement, on a accès au tremblement fantastique qui s’étend partout au commencement de l’abstraction pure, de l’abstraction qui illumine un chemin à défricher celui du temps lié au présent de la verbalisation qui fuit l’esprit retors. Liliane Tomasko nous dit que la rêverie vaut mieux que le rêve pour ce qui est de la peinture ; d’une peinture qui opte pour un territoire intérieur censé mesurer l’illusion qui traverse l’esprit pour dessiner ce qui trouve le doute, sa saisie, sa visibilité réelle. Aucun dessin, ni même de destin ne peuvent retourner la situation. Ce qui se meut alors, c’est une grotesque isomorphie du visible sous forme d’interactions entre couleurs et formes.

Ici, l’artiste provoque ces jeux, pour les démonter, les verbaliser avant de les transmuer dans une revisite de la mémoire, mémoire empirique, puisqu’elle n’est pas encore traversée par la mise en parole de sa visibilité. L’abstraction perdra les formes au profit de couleurs éruptives ou translucides, c’est là l’esprit d’abstraction qui commence, qui s’étend alors au plus haut degré de la résolution intelligente en peinture, on s’y tient pour une fois sévèrement, avec gravité, dans une ouverture à quelque représentation qui nous marque, qui nous met en présence d’un regard qui compose, qui musique alors !


Thierry Texedre, le 13 avril 2024.



Liliane Tomasko (1967-)

artiste peintre née à Zurich, Suisse

vit et travaille entre New York et Londres











 

lundi 1 avril 2024

La peinture et l'éloignement chez Patrick Wilson

 























La peinture et l’éloignement chez Patrick Wilson

 

Si par l’abstraction la peinture s’éloigne de la figure comme représentation surannée d’un corps d’écriture qui sourdement imprègne la peinture figurative, sa lecture du réel, prisme d’un soleil trop distant du réel, trop jeté au discrédit de la psychologie humaine, c’est pour mieux s’approcher et apprivoiser l’œil, montrer qu’il n’est pas encore son sujet peint, puisque de peindre ça passe aussi par une irréalité qui dérive, se retire du regard tant que de voir ça n’a pour conséquence qu’inventer le temps qu’il faut pour diminuer ce qui s’abstrait de peinture ce qui s’évide de peinture à se mettre infiniment en plongée dans les champs d’une géométrie disruptive.

Si chez Patrick Wilson les toiles sont empruntées aux paysages urbains de la côte ouest du sud de la Californie, la géométrie s’élance de la diversité des éléments traversés tels que le désert, le ciel et les plages, les villes tentaculaires aux géométries rappelant les Boogies Woogies de Piet Mondrian et les Obelisk de Barnett Newman. Les formes sont reconnaissables tant que leur géométrie n’interfère pas avec les couleurs et l’inquiétante compromission d’un extérieur et de l’intériorité des couleurs commémorant une réserve, comme pour passer de l’œil qui regarde à l’intellection qui questionne. Un questionnement qui se réserve le droit, de la ligne au spectre formel d’une géométrie qui puise dans l’impossible finitude de la forme ; toute forme se déterminant par rapport à une géométrie, les ombres portées se développant, se dévoilant pour distraire les dites formes qui s’entremêlent, pour forcer l’œil à ne jamais s’arrêter à l’objet qui questionne la forme dans sa pluralité. Les compositions sont pourtant montrées dans des diptyques comme point d’entrée. Si Joseph Albers travaillait sur ce qui fait corps entre couleur et forme dans le carré, ici le but n’est plus la forme encadrant la couleur, mais une expérience de la vision qui fait une polyphonie tant que ces compositions tentent une reconnaissance sculpturale du regard vouant sa temporalité n’est plus liée aux lieux d’un espace clos.

Il y a toujours de multiples points d’introduction dans la peinture de Patrick Wilson. Un peu comme si d’entrer et de sortir d’une peinture n’avait d’importance que de choisir son paysage son voyage tant que le regard espère questionner ce qui le séduit ou l’inquiète comme la rencontre avec une forêt, son silence et sa musique. La douceur des couleurs dégradées se mêle aux lignes fines pour atomiser les surfaces lisses et transparentes qui contrastent les unes avec les autres dans des accords lumineux à l’Ad Reinhardt, ou les subtils équilibres des compositions abstraites de Helen Lundeberg. Le spectateur est de passage, c’est donc là le grand subterfuge de la peinture que d’amener toute personne à rester devant une peinture, de faire une connexion, d’y entendre une petite musique qui s’installe et qui compose définitivement par-delà le regard notre espace intérieur.



Thierry Texedre, le 1 avril 2024.


 Patrick Wilson (1970-)

artiste peintre

né à Redding, Californie

vit et travaille à Los Angeles, Californie