Le
risque qui nous reste nous précipiterait dans ce devenir, ce rien
ombrageux qui vous suinte des orifices, jusqu'à cette terreur qui
frappe aux portes de ces oreilles inattendues. Incertaine digression
de ces errements involontaires, vers d'autres contrées, d'autres
surfaces à découvrir, le temps de dissoudre un peu de ce dire qui
soulève le rien dans une grande tempérance. Voilà ce risque
d'élocution qui s'installe, et s'étale pour d'imposantes
sollicitudes, de celles qui vous inondent un corps hirsute. Vu ce
risque-souvenir, vu ce rapiéçage de la peau tant désirée, en
coups incisifs, mortels peut-être, le corps s'évanouirait, au
risque de ne laisser qu'un souvenir effacé de notre chair caressée,
partout où des odes se seront soulevées dans la joie, et d'exister,
dans l'extrême tentation d'être et d'aimer, traversé par l'autre
enchéri de quelques doux attouchements. Risquer d'abolir l'aversion
pour l'autre aimé, jusqu'à prendre un corps comme si une divination
le rendait impossible à définir, impropre à le consumer, à le
consacrer peut-être. Voir ce qui semble réservé à d'impossibles
réalités, jusqu'au mensonge, celui de cette parodie-parole, de
cette pantalonnade amoureuse du néant, du rien ouvert/fermé de
cette face déchirée, pour s'entendre exciter l'acuité de
l'audition-affection du corps improvisé. On traîne ce raz-de-marée
de mots inaudibles, jusqu'au jour qui se lève, la nuit passée
par-là, le temps d'extirper du dedans, de sortir de la chair comme
une invitation à la compréhension, pour finir par interroger la
langue de ses mots inassouvis. De quelle peau sort ce sordide mot,
devenu lieu crasseux de la langue inviolée? Sinon de quelle réplique
peut-on sortir ces lamentations liées au masticage verbal? Aucune
lecture ne peut résoudre l'éloquente destinée de ce corps-cavité
qui est l'ordination de la chair. Par quelle simplicité - l'air qui
vous sort de cette gorge serait dramatique - se résout la langue?
Vrillée, décongestionnée, traumatisée, la langue s'éteindrait à
trop se souvenir de ses vertiges. Rassurée, elle se remet à écrire
ces quelques aboiements intelligibles, pour que de cette lecture si
aléatoire sorte d'une bouche béate et enflée, la verve de
l'oratoire vie en un lieu habité, caverne de l'inspiration du temps
en devenir, du commencement d'une rencontre de deux corps, de
plusieurs corps, d'une infinité de corps jusqu'aux confins de
l'univers, là où les étoiles dansent pour tromper l'homme sans
tête.
Thierry
Texedre, le 1 juin 2013.
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