« Lorsque les travaillent sur la peinture shan shui chinoise, ils ne cherchent pas à présenter une image de ce qu'ils ont vu dans la nature, mais ce qu'ils ont pensé de la nature. Il n'est pas important que les couleurs et les formes peintes ressemblent exactement à l'objet réel ou non. La peinture shan shui réfute la couleur, l'ombre et la lumière et le travail du pinceau. La peinture shan shui n'est pas une fenêtre ouverte pour l'œil du spectateur, mais plutôt un objet pour l'esprit du spectateur. La peinture shan shui est donc plus ou moins un véhicule de la philosophie. Le shan représente le "yang" ou les éléments forts, hauts et verticaux, tandis que le shui est le "yin", doux, horizontal et couché sur la terre. Les éléments verticaux et horizontaux doivent être maintenus en équilibre. »
« L’artiste recherche la rencontre. Chaque réalisation n’est faite que de couleurs enlacées, tressées. Il faut écouter la peinture pour former un corps avec elle, l’éprouver, rentrer dans la sensation pour, enfin, atteindre une couleur que l’on ne peut pas nommer, quelque chose qui a à voir avec le glissement du regard. »
La peinture est toujours abstraite
La peinture est abstraite. Les formats sont octogonaux puis deviennent rectangulaires. Un point nodal important, pour le regard, en quelque sorte une pénétration dans une profondeur, celle de l'intime qu'un sujet qui figure n'a pas encore enlevé de son raisonnement, celle d'une représentation en suspens. Seul risque d'un état perceptible d'une reconnaissance, les lignes horizontales de chaque peinture montrent cette « descente » qui nous arrive à lever d'abord le regard avant de le redescendre pour dessiner l'ensemble ouvert au format. Une « descente aux enfers » d'un temps de la suspicion. L'encre est appliquée au pinceau sur du papier qui est marouflé sur Dibon. On entre en relation avec la peinture comme si le toucher pouvait résoudre ce que l’œil n'a pas l’occurrence d'apporter, de résoudre. On pense beaucoup à Monet quand on regarde les fondus, les entrelacs de couleurs « photosensibles ». La lumière qui se dégage révèle une physique des couleurs qui irradient un certain traitement horizontal de la verticalité des peintures. Cette peinture est une présence du sujet parce qu'elle ose montrer ce rétrécissement figuratif qui fait frange à un sujet de la reconnaissance. Les couches colorées des glacis d'encre font penser à un autre peinture, celles d'un Marc Devade (ici, il y va d'une « politique » du visuel, plus ancré dans la subtilité du pan pictural), autre peintre lettré. Quelle poésie peut mieux révéler ces couleurs diffuses, aux tons de fines nuances, presque imperceptibles, aux vibrations dans un jeu d'alignements dans une verticalité, en coulées d'une verticalité qui coopère avec parfois des contrastes selon l'agencement des bandes et des transparences « sonores ». Si les couleurs sont en suspension, on tire le geste jusqu'à son fracassement coloré, matière colorée, matière qui pense l'absence du geste sous un œil altéré parce qu' atterré. Les couleurs varient dans leur agencement selon qu'une peinture. Faut-il ne pas encore nommer ces couleurs et y voir toutes ces coulées en fondus, laissant ainsi le spectateur s'emparer du mélange des tonalités qui s'imposent à l'imagination d'un regard ouvert au monde ?
Thierry Texedre, le 17 mars 2022.
Claire Chesnier (1986-) France, vit et travaille à Biziat dans l'Ain
artiste peintre, plasticienne.
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