mardi 28 mai 2024

C'est pas l'heure d'y aller






















 C’est pas l’heure d’y aller


Pousser sur l’autre versant

tuer l’impropre l’illégitime

suturer ce sacré qui vient

eschatologie du sacré nu

sacerdoce d’un lieu interdit

au risque de trouver le sens

autrement du corps cavité

capacité de la peau à dire

ce quelque chose de tactile

l’enfant terne boit la trouée

et la visite dehors pour jouir

de cet inconnaissable désir

au revers entrain de naître

voilà l’apothéose du paradis

sur l’infestation de ces pets

notoires pas si vrais en jets

du grain de la foi qui finit

par se taire quelle dystrophie

on rentre dans l’ère de l’IA

passablement déprimée oui

quelle intelligence peut lire

ce que le sacré a ôté du corps

sinon d’absolu et d’infini

traitement du jour d’après

pour nous faire croire encore

à ce sens insignifiant d’avaler

le plaisir par tous les pores

lente agonie du sexe qui crie

à trop s’égosiller du temps

qui lui reste à avoir attenté

au lieu qu’une lueur qui bat

n’aura pas l’ivresse d’assouvir.



Thierry Texedre, le 27 mai 2024.





peintures de Thomas Dillon (1986-)







lundi 20 mai 2024

La peinture est la même toujours

 






 

La peinture est la même toujours

Isomorphie non contiguë


Suintement voilà l’affaire qui montre qu’une peinture meurt avant de reconnaître que le peintre souffre d’essayer et d’effacer recommencer effacer encore laisser peut-être quelque chose qui fasse corps de son corps peut-être ou du moins celui qui essaye de faire que naisse un sens une altérité susceptible de contredire l’image qui précède dans l’incidence d’une autre errance. Ici le temps passe pas cette absence de ponctuation dans l’entre-deux points d’une phrase anecdotique puisque deux points et points se congratulent dans leur introduction. Le peintre pointe le bout de son instrument à plonger dans la ligne la forme la couleur sans jamais démontrer que ces actions traversent le présent pour montrer qu’entre deux points ça s’essouffle à arrêter le geste. C’est une infinité de retours sur l’irruption de quelque chose qui rythme le corps de peinture vers sa fin c’est-à-dire vers sa résistance au présent. Cette immanence de peinture se distingue en outre de sa sœur la musique mais elle puise dans le même espace sa réverbération sa musicalité son indéfectible positionnement entrant et sortant de la figure peinte au même titre que la musique se montre sous cette forme de vacuité caressant les risques à entendre ce que la peinture voit sans jamais se poser sur ce qui pense un tel écart. Pourquoi la peinture danse cet écart si on la laisse montrer quelque chose même d’informel ou supposé plein d’interrogation en réaction à l’espace qui impressionne tout regard tout corps déplacé. Un corps est déplacé parce qu’il est soumis à un regard déviant l’ illusion devant une peinture qui fait déjà volume dans l’esprit de la circulation d’un public. L’esprit de contiguïté force à retirer du peint toute expectative musicale jusqu’à en laisser sa trace laisser ce qui ressemble au rythme/couleur ce quelque chose d’insatisfaisant ou qui ne peut pas être apposé. Le peint cherche alors avec quelle matière cette musique va coller au risque du vrai laissant le vraisemblable de la musique s’y montrer comme ressort de la matière peinte collant au sujet qui l’extrait qui ne l’illumine pas encore par le verbal. On ne regarde plus pour aimer ce qui est peint on aime parce que le verbal n’a pas encore dit son dernier mot. C’est là qu’on commence à chercher l’émotion qui monte d’une peinture qui résiste au verbe et qui donne des coups au corps comme un corps à corps avec le peintre par son absence/présence depuis la peinture qui nous voit qui nous percute.




Thierry Texedre, le 19 mai 2024.



Sergio Padovani « Les Dieux dévorent » 2024

peinture huile, bitume et résine sur toile, 60 x 50 cm







lundi 13 mai 2024

Incidence














 























 Incidence



Io Burgard nous met dans l’embarras quand elle laisse passer cette chose dont on sait déjà à qui ça s’adresse. Il faut que ça se passe avant. Et puis ça peut rester un peu dans notre mémoire, mais un certain délitement de la forme commence à dénaturer l’image qu’on s’en était fait. L’artiste n’a rien à entendre de ce qui se formalise ou non sur la toile. Pas plus que la chose peinte n’a à voir avec une présence, celle d’un réel qu’un corps qui peint n’a de cesse de se sortir, par quel souvenir, par quelle irruption de son devenir fragmenté.

L’artiste peint tout en dessinant. Je veux dire par là, qu’elle dessine ce qui est en devenir, d’un devenir qui s’en suit comme « plâtré » dans nos rêves ; et nos fantasmes incertains retranchés alors dans cette chose sans incidence pour un corps en volume, un corps déjà trop tombé dans ces incantations frivoles qui frappent. C’est l’encensement général de celui qui reconnaît. S’il s’agit ici de fiction, ce n’est pas pour déshabiller un corps, une chose, une insignifiante présence à découvrir, à reconstruire, à assembler, mais certainement pour partir d’un réel, le tisser, le hisser au plus près de ce que la vue tente de satisfaire à trop voire pour moins comprendre. Io Burgard innove puisqu’elle peint partiellement la chose peinte (Celle qui ressemblait au temps de la peinture figurative qui découvrait la perspective, ce qui s’en suit de l’impossible fixité de l’être.). Il ne reste plus qu’à montrer ces mélodies de fragments qui s’inviteront au bon vouloir de notre vision, à la reconstitution d’une figuration alternative et fictive. « Le dessin est un espace où l’imagination ne connaît pas de limites. La sculpture permet une matérialisation concrète de cet imaginaire. » Peut-on remonter jusqu’aux peintures pariétales ? Les cavernes ont figuré ce que la sculpture aujourd’hui dans sa saturation, son isolement, sa décollation même de la peinture, un transfert sur cette voie royale qui s’ouvre au publique, de ne voir qu’à la condition d’« a-voir » peur. De ne pas savoir ce qui s’y trame de ce destin, du dessein d’une peinture qui frappe à la vision d’un corps contemporain en train de passer par son propre volume comme référent, affleurement de la matière sur la question d’être lié au monde, à l’animalité du faire pousser par la peur d’une fin ; la faim commence à peine à naître.

Ainsi, Io Burgard parle une langue qui est en osmose avec un corps qui délite, délimite par sa représentation sculpturale un essai pour le destin d’un dessin sans incidence, et qui recouvre alors l’histoire de l’art ; où serait la conséquence de quelque chose qui pour le moment n’a plus à voir avec le corps ?



Thierry Texedre, le 13 mai 2024


Io Burgard (1987-)

artiste peintre dessinatrice et sculptrice française

née à Talence (Gironde, France)

vit et travaille à Paris